Au pays des 35 heures, on pense véhiculer une bonne image en étant exagérément présent. Si tel est le cas, est-on plus efficace ? D’ailleurs, qu’est-ce que le présentéisme et comment se prémunir de ses conséquences négatives ? Les propos du docteur Philippe Rodet ont été repris successivement par France 3 Île-de-France (voir extrait ci-dessous), France Info et Le Monde, pour répondre à ces différentes questions, et donner son avis sur des pratiques observées qui peuvent être contreproductives.
Qu’est-ce que le présentéisme ?
Il existe plusieurs définitions à ce terme. Dans son sens strict, il est le contraire de l’absentéisme, c’est-à-dire le fait d’être présent au travail. Aux État-Unis, le terme est plus précis, on le traduit par « travailler tout en étant malade » (working while sick), cette traduction met ainsi l’accent sur le fait qu’on vienne au travail alors qu’on aurait dû rester chez soi. En France, la définition la plus répandue est la suivante : « Personne présente au travail mais qui ne parvient pas à se concentrer avec efficacité ». C’est sur cette dernière que nous nous appuyons au sein du Cabinet Bien-Être et Entreprise.
Le présentéisme permet de faire bonne figure, soit en restant tard le soir, sans être pour autant productif, soit en allant au travail alors que l’on est malade, avec le risque de transmettre sa maladie à ses collègues.
Quelles sont les conséquences du présentéisme ?
Dans le second cas cité précédemment, on voit facilement les conséquences que cela peut avoir sur l’équipe si on vient avec une grippe au travail ! Claudia Put, une chercheur Belge, a estimé en 2010 que le coût du présentéisme dépasse largement celui de l’absentéisme (voir l’article). Elle estimait alors que « le présentéisme atteint 61% des coûts totaux relatifs à la santé dans une entreprise, suivi par les frais médicaux (28%) et l’absentéisme (10%) ».
En effet, les signes de l’absentéisme sont très simples à constater : combien de jours nos collaborateurs ne sont-ils pas venus travailler, alors qu’ils auraient dû ? À l’inverse, mesurer le présentéisme nécessite de s’appuyer sur des indicateurs indirects : augmentation du nombre d’erreurs, réduction de la qualité du travail réalisé, productivité réduite, etc. D’autres effets peuvent s’observer, comme par exemple la volonté de tenir coûte que coûte, quitte à devoir prendre des médicaments susceptibles parfois d’altérer la vigilance.
Comment s’en prémunir ?
Le docteur Philippe Rodet souligne un point : « Pour réduire l’absentéisme, on peut être tenté de recourir à des subterfuges qui vont avoir tendance à transformer l’absentéisme en un présentéisme encore plus coûteux ». C’est ce qui a été mis en avant dans le reportage de France 3 Île-de-France diffusé en janvier 2019, offrir une prime pour les collaborateurs toujours présents pousse les personnes malades à venir au travail. Elles peuvent alors diffuser, si ce ne sont des virus, des émotions négatives à leurs collègues, ce qui affectera négativement l’ambiance de travail. Un cercle vicieux s’engage alors. Dans l’interview publiée par Le Monde, le médecin urgentiste devenu consultant le formule ainsi : « Encourager le présentéisme, c’est faire le lit de l’absentéisme ».
Le management bienveillant pour générer de la motivation intrinsèque
Une source de stress générée par un objectif irréaliste, une trop grande pression d’enjeu, un manager trop présent ou qui ne donne pas assez confiance peut générer du présentéisme. Comment agir en tant que manager ? Si on fixe un objectif au bon niveau, c’est-à-dire suffisamment ambitieux pour que le collaborateur se dépasse, se challenge, tout en restant réaliste, atteignable, il entrera dans un état de flow, source de concentration optimale, et de réussite. Un manager peut aussi s’appuyer sur la liberté d’action : s’il montre à ses collaborateurs qu’il a confiance en eux, confiance en leurs compétences, il va faire émerger des émotions positives dans son équipe, qui sont sources de bien-être, et de réussite. Grâce au sens, à la gratitude, ou encore en encourageant ses collaborateurs, il obtiendra le même type de résultats positifs. Le fondateur du Cabinet Bien-Être et Entreprise évoque en ces mots les bénéfices d’activer des leviers de motivation intrinsèque : « Entre être présent par obligation et être présent par envie, le résultat n’est pas du tout le même ».
Les leviers pour limiter le présentéisme sont nombreux. On a vu que le management peut jouer un grand rôle, la culture d’entreprise est également importante. En aidant chacun à avoir les meilleures performances possibles, on favorise l’efficacité réelle, la réalisation de soi et non l’impression d’être efficace, ce qui est bien sur l’objectif. De nombreux leviers existent pour améliorer les performances de ses collaborateurs, il est important d’y recourir pour les aider à atteindre le meilleur d’eux-mêmes.
Retrouvez l’interview pour Le Monde du docteur Philippe Rodet ici (11 janvier 2019).
Retrouvez un autre article publié dans Le Monde où il est cité (11 janvier 2019).
Il était également interviewé par France 3 Île-de-France le mercredi 9 janvier 2019 (revisionnez ce passage en cliquant sur la vidéo en haut d’article).
Interview reprise sur France Info ici.