Il faut laisser ses problèmes personnels chez soi…
Il y a encore peu, on expliquait à tout un chacun qu’il fallait laisser ses problèmes personnels chez soi et les préoccupations professionnelles au travail. Ainsi, le collaborateur ne serait pas détourné de sa mission et si celle-ci est complexe, génératrice de tensions, elle n’impacterait pas sa vie personnelle. Il faut bien avouer que le propos est séduisant. Mais regardons-le sous l’angle de la biologie et des émotions.
Si un collaborateur a des problèmes personnels importants le matin avant de partir de chez lui, il va avoir une réaction de stress, celle-ci va se traduire par une libération d’hormones et parmi celles-ci, du cortisol. Or, le cortisol a une demi-vie de 90 mn. La demi-vie est le temps au bout duquel la moitié de la quantité libérée est éliminée de l’organisme. Au bout de trois heures après le problème familial, le collaborateur a largement le temps d’être arrivé à son travail. En raison du taux de cortisol qu’il a encore dans le sang, son comportement sera différent. Il aura de même plus tendance à émettre des émotions négatives, très contagieuses, et susceptibles d’altérer les relations de travail.
Demander à un collaborateur de ne pas amener ses problèmes personnels au travail revient à lui demander de faire repasser ses hormones dans ses cellules afin que celles-ci ne perturbent pas son comportement. Difficile mission !
Mais, si ce n’est pas possible, que faire ?
Et si, au contraire, lorsque l’on voit qu’un collaborateur ne va pas bien, on allait vers lui pour lui permettre d’échanger et agir ainsi pour qu’il se sente écouté, compris. Le collaborateur se sentirait mieux, serait plus efficace et le manager réussirait mieux. En effet, selon un article paru le 13 juillet 2017dans la « Harvard Business Review » d’août-septembre 2017 sous la plume de Paul J. Zac, le célèbre neuro-économiste américain, « Des expériences neuroscientifiques menées par mon laboratoire montrent que quand les gens tissent intentionnellement des liens sociaux au travail, leur performance s’améliore. De façon similaire, une étude de Google a mis en évidence le fait que les managers qui « expriment de l’intérêt pour leurs coéquipiers et se soucient de leur réussite et de leur bien-être » surpassent les autres en termes de qualité et de quantité de travail fourni ».
On est donc passé du « il faut laisser ses problèmes personnels chez soi » à « l’expression de l’intérêt pour ses coéquipiers »…, de l’injonction séduisante au comportement bienveillant.
Paul J. Zac explique l’efficacité de la création de liens sociaux de qualité par la sécrétion d’ocytocine, une hormone qui contribue à diminuer le niveau de stress, faisant alors baisser le taux de cortisol. L’intérêt de cette approche est qu’elle s’appuie, à la différence de la première, sur des fondements biologiques.
Oui, la bienveillance, dans le sens où elle consiste à agir pour le bien de l’autre est parfaitement adaptée aux temps présents.